Thee Silver MT Zion and the Tralala Orchestra – Brou-lala symphonique

Une dépression post-rock s’est abattue sur Rennes ce dimanche à l’Antipode et pas n’importe laquelle : les descendants directs de « Godspeed you! Black Emperor », j’ai nommé « Thee silver MT Zion » en personne. Excusez du peu. Les demi-dieux canadiens ont revêtu leurs guêtres symphoniques (guitares, violons, violoncelle, contrebasse et batterie) pour un concert habité, poignant, presque humain. Chaque membre officiant comme choriste, tour à tour en couple ou tous ensemble, les voix comme blessées à mort, déchirées et déchirantes. Une ambiance quasi shamanique quand elles surgissent de partout, à l’unisson pour une musique engagée et tiraillée qui sait prendre son temps, qui monte en pression et qui explose par vagues pour mieux se répandre sur un public fasciné.
Les nouveaux morceaux s’enchaînent avec les succès de leurs précédents opus. Curieusement, ce ne sont pas les plus connus d’entre eux qui envoûtent le plus, mais d’autres, presque violents, plus acharnés encore. Les passages instrumentaux sont d’une puissance à renverser un buffle. Ils vous soufflent dessus et vous devez lutter fort pour ne pas basculer.
Et l’humanité dans tout ça ? Elle apparaît par bribes, dans les détails. La chaleur étouffante de la salle non climatisée et surpeuplée ; les gouttes de sueur d’un Efrim qui a suinté sang et eau et sans discontinuer, à la Brel, à force de déchirure ; une corde qui casse et autres séances d’accordage prolongées (la faute aux mains moites des musiciens), l’occasion pour le coup de discuter, avec le public et avec humour, de cette musique qui « ne dure pas 3 minutes » (mais 7 à 15 !) ou encore de la pluie et du beau temps à Rennes.
Et pour compléter ce tableau : « l’instant parfait ». Ce petit plus qui crée les légendes. Une poignée de secondes ; un moment de magie pour qui aura su prêter attention. La fin approchait lorsque la Dame aux oiseaux tatoués sur chaque épaule – Jessica – fit littéralement gémir son violon. Après avoir posé son archet, elle saisit son instrument à pleines mains. Et c’est sensuellement, avec la bouche, qu’elle fit fondre les larmes de ses cordes en un cri discret et douloureux : les larmes d’un ange. Dieu sait ce qu’elle lui chuchotait…
Vous l’aurez donc compris, ne manquez pas le brou-lala symphonique des Canadiens de Silver MT Zion… Ce n’est certes pas le genre de musique que l’on met en soirée, ni même au salon avec des amis, c’est une musique solitaire et dépressive que l’on écoutera au casque… ou en concert. Car oui, c’est bien en live – devant un public respectueux et non dans une ambiance de festival – que cette musique prend tout son sens.

Mes respects aniMistes aux vaillants Canadiens et à tous ceux qui auront su apprécier ce moment de dépression intense.

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Johann Johannsson – Les voix désacralisées

La voix est longtemps restée sacrée, reprenant à son compte le vieil adage romain du « Vox populi, vox dei »… Voix du peuple, voix de dieu. Une voix peu mobile, surcodifiée et confinée. Sacrée des siècles durant. Pas touche. Et pourtant les évolutions technologiques de ces dernières décennies ont vu celles-ci glisser de leur piédestal. Les mises en écho et autres cathédralisations, les auto-chœurs de ces hommes et de ces femmes orchestres qui s’autocomposent et bien sûr les vocodérisations parfois lourdingues, souvent ludiques et de temps à autres supra-sacrées. Ce que j’entends par là, c’est ce son alors unique et non humain, quasi-divin. Parmi les ludistes on retrouve nos amis de Daft Punk et leur « Around the world » qui aura su populariser un genre très jumpy. Porte entrouverte que quelques bons génies auront habilement emprunté. Prenons Gong Gong qui tziganise l’électro-libre avec son ‘tzig’ (Laughing with the moon) ; les déformations d’un I Monster sur « The Blue Wrath » (Neverod-doreven) ; ou plus récemment les douceurs argentines d’une Juana Molina (Son) que le temps embellit.
C’est néanmoins le post-rock qui aura donné ses lettres de noblesse à ce genre très XXIe siècle. Les Silver MT Zion qui auront réuni les voix des « 13 angels » (« He has left us alone but shafts of light sometimes grace the corners of our rooms »). Inoubliables…
Mais comment parler de ces voix d’outre-monde sans évoquer les terres froides de l’Islande à la source même de toute vie musicale sur Terre car s’y cachent les portes des Enfers jadis ex-humées par Homère, Virgile ou par Dante. Une nouvelle poésie épique qui a trouvé dans ce petit pays du bout du monde des porte-voix à sa mesure. Björk bien sûr qui sait si bien se porter en écho (« All is full of love » sur le Greatest Hits a la force des plus grands hymnes à l’Amour) ou exploser les conventions avec ses human beat-box savants (« Mouth’s cradle ») ; Sigur Ros (« Takk ») et ses ambiances déchirantes et fragiles. Artistes sans commune mesure qui me conduisent à mon coup de cœur du moment : Johann Johannsson. Un Prince de sang-mêlé, fils spirituel d’un Arvo Pärt (chantre de la musique contemporaine) dans un style propre où les tiraillements d’un Sigur Ros fréquenteraient les vocalises d’un Daft Punk mélancolique. Découvrez « Part 5 The Sun’s Gone Dim And The Sky’s Turned Black » (IBM 1401 A User’s Manual)… Quel adjectif pour cette pièce rapportée : beau, juste beau…
http://www.myspace.com/johannjohannsson
Et pour la petite histoire…

Salutations aniMistes
Ipzo l’aniMot

Et qui retrouvera les groupes de la même veine que Johannsson membres d’Info-Groupe…? Listen and see…

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